Numéro 11

Imprimer

 

EDITORIAL

Numéro 11:  Visions du  sertão dans l’espace et dans le temps

 

Revue Plural Pluriel n°11. Image: « Capitania de Goiás » (Bibliothèque d’Évora, Portugal). Création: I. Peruchi. Droits réservés.

 

“Sertão é isto: o senhor enfia para trás, mas de repente ele volta a rodear o senhor dos lados. Sertão é quando menos se espera”

 

Guimarães Rosa

 

Visões do sertão – Visions du sertão – est le titre d’un livre posthume d’Alfredo d’Escragnolle Taunay, dit vicomte de Taunay. Issu d’une famille française venue au Brésil dans les débuts du XIXe siècle, dont la figure majeure était Nicolas Antoine, peintre, membre distingué de l’Académie des Beaux-Arts qui a fondé à Rio de Janeiro l’institution de même nom, Alfredo de Taunay était militaire, homme politique, écrivain et historien. Son œuvre la plus connue est Inocência, l’un des plus beaux romans brésiliens du XIXe.

 

Cet auteur se caractérise par l’interdisciplinarité et par la transversalité de ses intérêts et de ses activités.  Tels sont les mots qui définissent le mieux ce numéro de Plural Pluriel, revue qui inscrit la pluralité – des voix, des opinions, des disciplines – dans sa propre nature et dans son titre, circonscrit toutefois à l’univers des cultures de langue portugaise.

 

Et rien de plus interdisciplinaire, transversal et pluriel que le sertão : de João de Barros, chroniqueur (dans le sens le plus noble de l’expression) et historien portugais du XVIe, lui aussi homme politique et intellectuel connu par son érasmisme, qui traite des sertões africains et asiatiques, à Gilberto Freyre, dont le nom dispense de toute présentation mais qui révèle pourtant, grâce à l’article de Maria Lúcia Garcia Pallares-Burke,  au delà de la zone sucrière dont il est le chantre, un réel intérêt par le sertão du Nordeste ; des missionnaires, portugais et italiens surtout, qui parcouraient le sertão de l’Afrique centrale aux XVI, XVII et XVIIIe siècles, qui nous sont présentés par Carlos de Almeida, jusqu’à Raquel de Queiroz, benjamine d’une des plus intéressantes générations d’écrivains brésiliens et qui fut membre du Parti communiste, dont Giulia Manera évoque les images de ce « monde là dehors » ; des voyageurs qui, au service de la Couronne portugaise, exploraient les sertões du Brésil et de l’Afrique orientale au début du XVIIIe, tels Lacerda de Almeida, brésilien de São Paulo qui mourut dans le sertão de Mozambique, occupé à démarquer les frontières, étudier la nature et, dans son cas spécifique, entreprendre la traversée de l’Afrique de la contra-costa à la costa, c’est-à-dire, entre le littoral de Mozambique et le littoral d’Angola, que présente Eugênia Rodrigues, jusqu’à ces voyageurs français de la deuxième moitié du XIXe siècle, dont Clotilde Gadenne analyse les textes et le regard sur le sertão, en le comparant à celui de Euclydes da Cunha, leur contemporain. Le dossier consacré aux Visions du sertão – qui donne son titre au numéro tout entier – se clôt apparemment sur un article de Eduardo Cavalcanti Bastos, consacré à Elomar Figueira de Mello, cantador, cantautor, ménestrel, troubadour et trouvère tout à la fois, perdu dans les cafundós et dans les barrancas (canyons) du fleuve Gavião. Mais il ne s’agit pas que d’un détour.

 

Les trois derniers articles de ce numéro composent ce que la nomenclature éditoriale désigne sous le nom de Varia c’est-à-dire un recueil de pièces diverses et variées. Il s’agit là d’une pratique récurrente de la revue Plural Pluriel : accueillir, au-delà des dossiers thématiquement constitués, des articles envoyés par des lecteurs et dont la qualité a également été confirmée par notre comité scientifique. Ces trois articles, écrits par de jeunes chercheurs, français et brésiliens, constituent presque un sous-thème de ce numéro 11, puisqu’ils s’intéressent tous trois à des femmes, écrivaines et parfois voyageuses comme les brésiliennes Nísia Floresta et Lindanor Celina, et la portugaise Lídia Jorge.

 

Les autres parties de la revue sont traditionnellement constituées par les COMPTES-RENDUS consacrés aux publications en France d’ouvrages consacrées aux cultures de langue portugaise, ce qui est le cas des deux livres, présentés. Mais là encore, ce numéro 11 innove en ajoutant aux ouvrages écrits, le compte-rendu d’un film documentaire qui, par son titre – Outro Sertão -  et son regard, trouve un écho singulier parmi ces visions du sertão.

 

Au-delà, dans la partie TEXTES ET DOCUMENTS, une entrevue originale de Elomar Figueira de Melo, réalisée par le même Eduardo Cavalcanti Bastos, qui lui consacre un article dans ce numéro.

 

Interdisciplinarité, transversalité et pluralité : tels sont les mots-clé  et traits d’union entre  ces personnages et auteurs divers. Sans oublier les voix occultes et autres textes sous-jacents : Euclides da Cunha, Guimarães Rosa (toujours), Ariano Suassuna et Luís Gonzaga. C’est donc à eux, et spécialement à Gonzaga, dont on a fêté récemment le centenaire, que nous dédions ce numéro de Plural Pluriel.

 

André Heráclio do Rêgo

 

 

Articles complets/ Artigos completos

Résumés/ Resumos